Du rétro à la next-gen : Jean-André Santoni, artisan du portage et de l’innovation vidéoludique
INTERVIEW
Pierre-Vincent PIETRI
2/20/20254 min read
Pierre-Vincent : Bonjour Jean-André, merci d’avoir accepté cette interview ! Peux-tu nous parler de ton métier et de ton quotidien en tant que développeur de jeux vidéo ?
Jean-André Santoni : Bonjour et merci pour l’invitation ! Je suis développeur de jeux vidéo, spécialisé dans l’adaptation de jeux anciens sur des plateformes modernes. Mon travail consiste à porter des jeux PlayStation 1, PlayStation 2 et PSP sur PlayStation 4 et PlayStation 5, en collaboration avec Implicit Conversions, une entreprise basée aux États-Unis et au Canada. Je travaille également sur d’autres plateformes comme la Nintendo Switch et la Xbox, selon les projets.
Pierre-Vincent : Qu’est-ce qui t’a amené à te spécialiser dans le portage de jeux rétro ?
Jean-André Santoni : J’ai toujours été passionné par le rétrogaming. J’aime l’idée de préserver des jeux anciens et de les rendre accessibles à un nouveau public. Beaucoup de joueurs ont des souvenirs forts liés à ces jeux et les redécouvrir sur des consoles récentes est une expérience précieuse. De plus, techniquement, c’est un travail stimulant : il faut adapter du code ancien à des architectures modernes, optimiser les performances et parfois même recréer des fonctionnalités qui n’existaient pas à l’époque.
Pierre-Vincent : Peux-tu nous donner un exemple de projet récent sur lequel tu as travaillé ?
Jean-André Santoni : Bien sûr ! Récemment, j’ai travaillé sur le portage de Micro Mages, un jeu homebrew sorti sur NES, pour la PlayStation 4 et la PlayStation 5. C’est un projet intéressant, car Micro Mages est un jeu conçu pour tenir dans les contraintes techniques d’une NES d’origine. Le porter sur des consoles modernes tout en respectant son essence rétro était un vrai défi.
Pierre-Vincent : Tu travailles entièrement à distance. Comment organises-tu tes journées ?
Jean-André Santoni : Effectivement, mon équipe est répartie sur plusieurs continents, et nous collaborons complètement en ligne. Cela signifie que mes journées ne suivent pas un emploi du temps classique. Je commence souvent par consulter mes mails et messages pour voir s’il y a des retours sur mon travail ou des nouvelles directives. Ensuite, je me plonge dans le développement, que ce soit du portage ou du développement de mes propres jeux.
Le télétravail me donne une grande flexibilité. Je peux organiser mes journées en fonction des besoins des projets et de mes moments de productivité. Évidemment, il faut une bonne discipline pour rester efficace, mais c’est un mode de travail qui me convient parfaitement.
Pierre-Vincent : Travailler à distance depuis la Corse, c’est un avantage ou un inconvénient ?
Jean-André Santoni : Un avantage, sans hésitation ! J’ai la chance de vivre dans un cadre magnifique tout en exerçant un métier qui me passionne. Contrairement à d’autres industries où il faut être sur place, le développement de jeux vidéo permet de travailler de n’importe où, tant qu’on a une bonne connexion Internet. En revanche, cela demande une bonne organisation pour gérer les décalages horaires avec les collègues et les clients.
Pierre-Vincent : Tu as une bonne vision du marché du jeu vidéo. Comment vois-tu son évolution actuelle, notamment pour les studios indépendants ?
Jean-André Santoni : La situation est compliquée. Il y a une énorme saturation du marché : trop de jeux sortent chaque semaine, et il devient extrêmement difficile de se démarquer. Les plateformes de distribution comme Steam ou le PlayStation Store sont inondées de nouveaux titres, ce qui rend la visibilité presque impossible pour un petit studio sans gros budget marketing.
Pierre-Vincent : En parallèle, les habitudes des joueurs ont-elles changé selon toi ?
Jean-André Santoni : Oui, beaucoup de joueurs préfèrent rejouer à des titres qu’ils connaissent déjà, plutôt que d’acheter des nouveautés. Des jeux sortis il y a cinq ou dix ans continuent d’avoir une forte communauté, tandis que de nouveaux jeux peinent à trouver leur public. Résultat : même les joueurs qui achètent des jeux récents les consomment moins intensément, ce qui impacte l’ensemble de l’industrie.
Pierre-Vincent : Quelle est la solution pour un studio indépendant face à ces défis ?
Jean-André Santoni : Il faut soit trouver une niche avec une communauté prête à soutenir le jeu, soit accepter que le succès n’est pas garanti et adapter ses attentes. Aujourd’hui, il ne suffit plus de faire un bon jeu, il faut aussi maîtriser le marketing, la communication et la relation avec sa communauté.
Pierre-Vincent : Utilises-tu l’intelligence artificielle dans ton travail ?
Jean-André Santoni : Oui, j’utilise GitHub Copilot, un outil développé par Microsoft. Il m’aide à générer du code automatiquement en fonction des commentaires que j’écris. Ce n’est pas révolutionnaire, mais ça me fait gagner du temps sur certaines tâches répétitives.
Pierre-Vincent : Selon toi, l’IA pourrait-elle remplacer certains métiers du jeu vidéo ?
Jean-André Santoni : Je ne pense pas. L’IA peut assister les développeurs, mais elle ne remplacera pas un artiste ou un game designer. Elle se base uniquement sur ce qui existe déjà et manque de créativité propre. Si l’industrie se reposait exclusivement sur l’IA, elle risquerait de produire des jeux sans âme, purement basés sur des tendances passées.
Pierre-Vincent : Penses-tu que l’île de beauté pourrait devenir un pôle du jeu vidéo ?
Jean-André Santoni : Il y a du potentiel. Beaucoup de jeunes ici sont passionnés par le jeu vidéo et la programmation. Avec le télétravail, il est tout à fait possible de travailler pour des entreprises du monde entier depuis la Corse. Une école spécialisée pourrait aider à structurer la filière, mais l’apprentissage autodidacte reste une option viable.
Pierre-Vincent : Tu participes à la Gaming Fabbrica cette année. Que vas-tu y présenter ?
Jean-André Santoni : Je vais présenter deux jeux en développement : Mystic Seals, un action-RPG inspiré de Zelda 3 avec des donjons générés aléatoirement et Arcana Mundi, un jeu d’arcade sur Mega Drive, inspiré de Puzzle Bobble. Je viendrai avec une véritable Mega Drive, une cartouche physique du jeu et quelques goodies pour les participants.
Dans le monde du jeu vidéo, certaines carrières prennent des chemins atypiques, mêlant passion et opportunités inattendues. Jean-André Santoni est l’un de ces développeurs qui, depuis la Corse, contribue à l’industrie du jeu vidéo en travaillant sur des portages et en développant ses propres projets. Il nous raconte son parcours, son quotidien et sa vision du secteur.
Pour en apprendre davantage sur Jean-André Santoni et ses réalisations, rendez-vous sur sa page GitHub !
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